Mosel Graacher Himmelreich Kabinett 2019
Weingut Joh. Jos. Prüm

« Des vins totalement addictifs qui trônent au sommet de la Mosel Allemande... Au-dessus, c’est Egon Müller, mais c’est 3 fois plus cher ! » Chers membres passionnés, la vente de ce matin s’adresse avant tout aux puristes, aux collectionneurs, ou plus largement à ceux qui voient dans les très grands terroirs de Mosel, une des plus vibrantes expressions au monde du cépage riesling. En écrivant ces quelques lignes, je ne peux m’empêcher de penser à Jacky Barthelmé (domaine Albert Mann) avec qui je déjeunais au printemps autour d’un Clos de la Barre 2018 de Dominique Lafon. Je lui avais demandé : quels sont, pour toi, les plus grands rieslings du moment ? Il m’avait répondu : sans hésiter, en Mosel Allemande ! Dieu sait pourtant si il en connait un paquet... Mon deuxième souvenir est on ne peut plus frais, puisque lundi, nous organisions chez Chais d’œuvre une masterclass autour des vins de J.J Prüm. Une véritable leçon et une dégustation bouleversante qui nous a permis de faire une verticale, par cru et par équilibre, des différents grands crus du domaine. Si vous n’êtes pas familier avec le vocabulaire des vins Allemands, pas de panique, Chais d’œuvre est là pour ça. Au travers de ce j’aime j’achète, vous allez très vite saisir les nuances et faire votre choix sans difficultés. Vous aurez surtout les clefs pour mettre en valeur à merveille ces flacons, tout en sachant en parler à vos amis. Les anecdotes sont nombreuses, alors accrochez-vous. J.J Prüm est un domaine historique de la région, créé en 1911. Il s’étire sur 21 ha et différents petits villages qui se succèdent le long de la Mosel. Un paysage totalement unique, avec ces coteaux de schistes vertigineux où la pente atteint parfois 45% ! Le domaine possède 4 crus, dont 3 « Grosses Gewachs », leurs grands crus locaux. 60 ares de Zeltinger ; 5 ha de Badstube, 8 ha de Graacher Himmelereich et 8 ha de Wehlener Sonnehur (le cru de légende du domaine). Pour les distinguer, c’est simple, tout n’est qu’une question d’exposition et de capacité donc, à emmener les messages dans différents degrés de concentration. Anecdote croquante : 13% des vignes sont greffées, le reste est franc de pied car les ardoises ne sont pas trop le terrain favori du Phylloxera ! Cela se ressent dans le caractère cristallin et pur des vins qui, ont le sait, sont toujours plus élancés et vibrants quand ils naissent franc de pied. En termes de style, ce sont des vins à 7,5%, 8% d’alcool qui, selon le degré de concentration au départ, se déclinent en Kabinett, Spatlese, Auslese. Certaines versions « Goldkapsel » accueillent au domaine un peu de botrytis, ils sont produits en quantités infimes. On notera dans l’intégralité de la gamme du domaine, une quête de pureté maximale, avec pour le coup, des taux de SO2 très mesurés pour la région. Même jeunes, les vins sont précis, ouverts et sont de véritables loupes du sous sol de schiste qui anime et rythme la dégustation. Perso, j’ai été scié par la complexité et le caractère ultra digeste des vins dégustés, les ph et acidités contrastent avec panache les gammes aromatiques et la structure des vins. La douceur s’efface gustativement au gré des années, un peu comme dans les demi-secs de légende de Philippe Foreau au Clos Naudin... Plongez-vous dans le j’achète pour un gros zoom sur toutes les cuvées !

L’ascension vertigineuse de la gamme commence obligatoirement par le Badstube, un des terroirs les plus frais du domaine. La version « Kabinett » est récoltée en premier : on recherche minimum 65° Oechslé pour ce niveau de structure. Le vin titre 8%, affiche un ph de 2,9 et un excellent support d’acidité. En face, la matière est superbe, très fine, elle affiche des tonalités légèrement exotiques, avec des notes de carambole, de kiwi, et de pomme granny. Le schiste, omniprésent dans les teintes aromatiques des vins au domaine, amène ces sensations chaudes de silex frottés et un relief fumé. Dans ce vin, c’est 40 gr de résiduel, quasiment imperceptibles tant l’équilibre acidulé est superbe, les vertus apéritives de ce Badstube sont fabuleuses ! Je me voyais déjà à l’apéro autour d’une bouchée genre huître, kiwi, sel fumé ! Le ton monte clairement quand on attaque les grands crus : Graacher Himmelreich en premier qui peut s’exploiter jeune aussi, mais qui vieillit tellement bien... La version Spatlese sur 2019 nous rappelle combien l’année fut dingue : pur, précis, ce vin est une infusion de poire william où se glissent des touches de menthol, et des zestes de citron vert. Les 60 gr de résiduel sont encore une fois totalement absorbés par la matière, le vin déroule en bouche et ne vous lâche plus ! J’aurais pu boire la quille tout seul si on ne m’avait pas freiné ! Sa version Auslese sur 2020 est une quille à collectionner... C’est l’essence du cru qui s’exprime, avec une concentration exceptionnelle. Sans bousculer le Wehlener, il joue dans la cour des vins rares et très prisé des collectionneurs. Parlons justement du KING, le cru de légende du domaine : Wehlener Sonnenuhr. Pente de dingue, exposition très solaire... C’est du sang de schiste qui coule des raisins de cette parcelle où le minéral est explosif et omniprésent. La concentration dans les baies ici est totalement saisissante, enthousiasmante même... mais attention, c’est un vin de garde qui mérite un peu de patience. La version Kabinett vous plongera dans le schiste pur, on ne sent quasiment pas la douceur (40 grammes) avec une concentration en extrait sec qui saisit ! Le Spatlese est lui aussi addictif, un poil moins engoncé dans la signature minérale, avec en jeunesse ici, un peu plus de messages liés au fruit, un cocktail poire- citron vert. Son allonge frôle les 30 secondes ! L’Auslese est un vin de collection qui, dans certaines versions à la vente aux enchères de Treive (tradition annuelle en Mosel) atteint 400€ la bouteille ! Une folie dans le verre, avec 80 grammes de résiduel, une concentration de feu ... mais patience pour ce vin qui ne parle qu’au bout de 10 ans... Si vous avez une bonne cave, sincèrement foncez ! Petit mot pour finir sur « Zeltinger », le mouchoir de poche de la maison qui se coince, en style, entre Graacher et Welhenner. Le Spätlese joue la carte de l’orange orientale, du citron confit et des notes fumées. En y goûtant, j’ai rêvé d’un maquis de tourteaux aux épices orientales avec un peu de gingembre et de kumquat confit : le genre de mets qui propulse ces grands vins Allemands dans les étoiles et vous avec !