Domaine des Comtes Lafon
Pas facile de résumer en quelques lignes plus d’un siècle d’une histoire familiale qui se confond de si près avec l’histoire des vins de Meursault, avec ses épisodes difficiles, parfois, et ses moments de grâce, souvent. Tout commence à la fin du XIXème siècle lorsque Jules Lafon, contrôleur de l’enregistrement, alors nommé à Dijon, rencontre puis épouse Marie Boch, issue d’une famille de propriétaire-négociant à Meursault. Elle possède, entre autres, le désormais fameux Clos de la Barre, cette superbe parcelle de plus de deux hectares, au cœur du village de Meursault, sur laquelle s’ouvre la maison familiale au style victorien. Au fil des années, pris d’une véritable passion pour ces terroirs de la Côte d’Or qu’il a appris à découvrir, Jules Lafon, devenu avocat, va s’employer méthodiquement, et avec un flair redoutable, à acquérir des parcelles de vignes sur quelques-uns des meilleurs terroirs de Meursault (on pense aux Goutte d’Or, Genevrières et Perrières bien sûr), mais aussi à Volnay et à Chassagne-Montrachet, où il se porte acquéreur en 1918 d’une merveilleuse parcelle du Montrachet Grand Cru, attenante à une autre vigne mythique, celle de la Romanée-Conti. Jules et Marie, honoré du titre de Comte pontifical, ont clairement donné au Domaine des Comtes Lafon les contours qu’il a encore aujourd’hui. S'en suit une période plus chaotique, marquée par la disparition prématurée de Pierre, un des fils de Jules et Marie, et la volonté d’Henri, leur autre fils, de vendre le domaine. Il faudra attendre l’arrivée de René Lafon (fils de Pierre) en 1956 pour que la propriété retrouve un nouveau souffle. Après avoir ardemment lutté pour que le domaine reste dans le giron familial, René va s’atteler à remettre en état le formidable patrimoine viticole des Lafon, avec l’aide précieuse des métayers qui exploitent à l’époque l'essentiel des vignes, au premier rang desquels on retrouve les Morey, autre grand nom murisaltien. Tout en menant un ambitieux programme de replantations, il initie également la mise en bouteille au domaine, qui concernera à partir de 1961 l’intégralité de la récolte. 1984 est une nouvelle année charnière dans l’histoire des Comtes Lafon : Dominique Lafon signe son premier millésime et reprend officiellement la succession de son père René, d’abord au côté de son frère, Bruno, puis seul. Une nouvelle ère s’ouvre, qui va faire entrer progressivement les vins des Comtes Lafon dans le panthéon des plus grands vins de Bourgogne, faisant aujourd’hui l’objet d’un véritable culte aux quatre coins de la planète. Conscient du caractère exceptionnel du patrimoine viticole familial, où les vieilles vignes se taillent la part du lion, et convaincu (déjà !) qu’un grand vin se fait avant tout à la vigne, Dominique entreprend d’abord de dénoncer progressivement les contrats de métayage afin d’avoir pleinement la main sur les méthodes culturales employées. Dès 1993, l’intégralité des 14 hectares que compte alors le domaine est désormais directement exploitée par Dominique et son équipe. Dominique Lafon désormais entouré de sa fille Léa et de son neveu Pierre n'a cessé d'améliorer sa production malgré la notoriété du domaine. Depuis une bonne dizaine d'années, le style des blancs a évolué vers davantage de fraîcheur et de race, sans perdre ni en poids, ni en ampleur de bouche. Le style de vinification a aussi changé : les vins vont davantage vers la réduction, ils sont plus élancés, moins crémeux. La large gamme de Meursaults s’est étoffée depuis 2011 de deux Premiers Crus : Les Bouchères et Poruzots. Sans perdre en densité, les rouges ont gagné en équilibre par un travail plus délicat durant la phase d'extraction, d'où des tanins plus souples et moins massifs. La meilleure gestion des élevages donne plus de place à la dimension du fruit. Rouges comme blancs sont d'un niveau exceptionnel sur toute la gamme et font partie du panthéon des meilleurs vins de Bourgogne.