Alsace 2017 2017
Domaine Marcel Deiss

"C'est notre vin le plus simple, le plus modeste. Mais il exprime déjà notre philosophie"… Après avoir passé une bonne heure à écouter Marie Hélène, la compagne de Jean Michel Deiss dans les vignes de son " Altenberg", un terroir de légende, Catherine et moi sommes revenus éberlués par le discours, la démarche agronomique, la réfléxion qui anime le domaine. Au delà de la biodynamie, qui pour eux, est une " normalité, un bon sens paysan", ils défendent l'idée qu'un grand vin ne naît pas d'un seul cépage, mais d'une multitude de cépages, qui forment avec les arbustes, l'herbe, les plantes, et la faune, un exosystème qui permet d'exprimer l'identité d'un lieu... Pour étayer ces propos, Marie Hélène fait gouter des pates de coing, faites de cognassier qui poussent au milieu de leur vignes, avec d'autres arbres fruitiers. Chaque pâte de coing est différente, alors que la recette est la même. Chaque pate de coing prend le gout du lieu: C'est dingue non? Cet Alsace est donc, une forme de démonstration de leur philosophie. Impossible de dire quel cépage le compose, mais il est complexe, très savoureux, et anormalement long pour un vin de ce prix. Il s' oriente sur le nefle, le coing, les infusions de plantes et la pomme. Un vin pourtant né en plaine, au milieu de ceux des voisins qui font pèter les compteurs de rendements ( 88hl/ha en moyenne), et qui étaye un des axes majeurs de l'oeuvre de Jean Michel Deiss: Un grand vin naît dans un écosystème ou il y a compétition et diversité.

Quand on goute à un " entrée de gamme" aussi sérieux, on se dit forcément que la suite va être démente! Sincèrement, Jean Michel et Mathieu Deiss n'ont pas volé leur 3 eme étoile cette année dans le guide de la RVF, car la moindre bouteille dans la gamme donne des frissons de bonheur, même dans une bouteille aussi simple que cette bouteille d'Alsace. Si vous aimez les vins qui font "réfléchir", les trames de bouches amples et savoureuses, et les rapports prix plaisir canon, alors goutez à cette pépite vendue à prix doux. A l'apéro, ce vin est une petite "tuerie" qui dès la première gorgée, met tout le monde d'accord. Au bout de 5 mn, la bouteille est finie et en appelle forcément une autre. A ce moment là, vous engagez la conversation avec vos convives autour des questions suivante: A t-on annihilé le potentiel de nos terroirs en se limitant à un seul cépage? Quelles raisons ont poussé l'Alsace à produite autant de vins depuis l'entre deux guerre? Qui a permit à la région de produire des jus en plaine à 88 hl/ha, en plantant mécaniquement des cépages à fort rendement? Lisez sur l'histoire de la région, et vous comprendrez comme nous vendredi dernier, que Deiss n'est pas un hurluberlu, mais un homme archi cultivé qui n'a qu'un seul but, une seule vision: Faire revivre l'Alsace d'avant le Philoxéra, celle qui rayonnait dans toute l'europe par ses vins fabuleux!