Amarone della Valpolicella 2013
Azienda Agricola Dal Forno Romano

L'Amarone de Dal Forno, c'est un peu la Romanée-Conti de la Vénétie, sûrement le vin le plus recherché, et le plus encensé mondialement de ce secteur de l'Italie avec peut être, comme seuls concurrents, ceux de Quintarelli. Née d'une sélection drastique de raisins, de rendements hyper serrés, et vinifiée de manière la plus "artistique" qui soit, cette cuvée n'appartient plus au monde du vin, mais au monde de l'art. Chaque bouteille s'envole à des prix délirants dans les salles de ventes quand le vin arrive à maturité et on comprend l’engouement mondiale pour ce genre de flacon quand on y goûte. Ce 2013, que j’ai croisé dans un verre chez un ami passionné d'Italie, m’a donné envie de renouer avec ces plaisirs si singuliers de la région et de vous les proposer : un vin profond, presque mystérieux dont la couleur opaque et la teinte aubergine aux reflets violines, annoncent toute la concentration. Au nez, un mélange assez unique de sève, celle des rafles qui contrastent un fruit surmûr d’une précision et d’une intensité qui n’a aucun équivalent. L'élevage, qui chez Dal Forno relève de l’art, est du genre luxueux, mais pas ennuyant. Il vient ponctuer ce concentré de myrte, de cassis et de mûres sauvages par des fragrances  mentholées. Un bouquet qui d’ailleurs, n’est pas sans rappeler les premiers nez de certaines Petites Sibérie chez Hervé Bizeul (avis aux connaisseurs), qui naissent dans des équilibres similaires. En bouche, la partition est différente par contre, puisque le contraste vient de la dualité entre les tanins (amaro = amer en Italien) qui épouse la surrichesse du passerillage. L’équilibre final est saisissant, tout comme la persistance qui, sur cet Amarone, dépasse la minute en persistance.  Un vin juste légendaire, qu’il faut absolument boire une fois dans sa vie !

J’ai en tête, mes premières bouteilles de Dal Forno servies au Georges V, lorsque j’étais commis sommelier dans ce palace parisien ; Eric Beaumard proposait ces nectars aux véritables connaisseurs, et le proposait en association avec de sublimes « lièvres à la Royal » de Philippe Legendre ! A l’époque, les vins paraissaient chers, mais c’était bien avant l’envolée délirante des grands crus classés de Bordeaux ou de Bourgogne. Aujourd’hui, à prix égal avec ces grands flacons, l’Amarone de Dal Forno a plusieurs atouts : il est bien plus rare, et bien plus singulier. A peine 15000 cols sortent de la cave du domaine, quand tout va bien... Franchement, si vous pouvez vous permettre cette petite folie, foncez ! Soit vous la boirez en vous délectant de chaque goutte, soit vous la revendrez à prix d’or à des collectionneurs !