Chassagne-Montrachet 2023
Domaine Bruno Colin

« Un millésime délicieux dans les deux couleurs au domaine, avec quelques blancs transperçants comme les Truffières, les Blanchots et Rémilly ! En rouge, la trajectoire initiée depuis 2020 est parfaite, jamais ils n’ont été aussi définis et vibrants ! » Chers membres passionnés, voici comme chaque année en avril, un petit focus sur l’œuvre de Bruno Colin, cet immense vigneron de Chassagne que l’on suit avec passion depuis 2014 chez Chais d’œuvre. Et c’est avec une certaine excitation que j’écris ces quelques lignes ce matin, car nous avons pu redéguster les 2023 en bouteille lors d’une fabuleuse dégustation à Paris en mars dernier. Un moment qui a confirmé mon feeling sur les 2023, si beaux et si accessibles dans les deux couleurs ! En parlant un peu avec Bruno et Antoine Lesney, son bras droit au domaine, nous avons compris un peu l’équation sensorielle, avant même d’y plonger le nez : les blancs sont mûrs, un poil plus que 2022, mais sauvés en équilibre par des rendements généreux, et des rapports peaux-jus qui laissent parler les terroirs. Ainsi, un Saint-Aubin est un Saint-Aubin, un Chassagne 1er cru est un Chassagne 1er cru… Et que dire des rouges, si ce n’est que j’adore ce millésime pour sa décontraction. On est loin des vins hyper denses 2020, où dans pas mal de domaines on a eu du mal à reconnaître le pinot… Ici, on joue la carte du rubis, des fleurs, des petites baies acidulées.. C’est la vraie Côte de Beaune, comme on devrait la décrire dans les manuels de mention sommellerie ! Plongez vite dans le j’achète, pour découvrir toute la gamme !

Avant de parler des vins, parlons style : Bruno a initié dès ses débuts, à l’instar de Thierry Pillot et Pierre Yves Colin, les fermentations sous bois en 350 litres, en place des 225l. Des choix d’élevage qui donnent en blanc des vins plus cristallins, plus ciselés. On note également au domaine depuis 2020, une gestion plus prudente du SO2, ce qui donne des vins plus épanouis, et moins serrés. En rouge, le domaine égrappe et favorise la jutosité. Les extractions sont super douces et les vins très communicatifs, comme l'atteste le Maranges 1er cru Fussières 2022, servi au LAB la semaine dernière ! Plongeons dans la gamme et saluons le croquant et le panache du trio Santenay, Chassagne, Maranges, qui offrent encore une fois un crescendo de sensations, qui débutent au gré d’un cœur de bouche salivant et de baies acidulées. Les 2023 ont moins de tanins que les 2022, ce qui le rend addictif, même en jeunesse. Le Santenay tient sa promesse, et n’affiche aucune rusticité sur ce millésime ; le Chassagne apporte du minéral en prime des baies acidulées, il se tient plus droit, et va plus loin en persistance. Le Maranges Fussières est aussi complexe que le 2022, avec un millefeuille aromatique et tactile juste fabuleux ! En blanc, le petit Bourgogne est une introduction totalement décomplexée des vins du domaine. Il n’est pas né pour faire des concours, mais pour séduire à l’apéro par ses touches pêche de vigne et d’agrumes.. Le Saint-Aubin Charmois est comme chaque année délicieux ! Ce ne sont pas les vignes en propre du domaine, mais un achat rondement ficelé qui, dans les mains de Bruno, prend la dimension des grands vins de la gamme. Premier Cru oblige, on a déjà la lecture minérale crayeuse de Saint-Aubin dans ce vin qui va assez loin en persistance. Côté prix, c’est haut de gamme, mais pas totalement décorrélé du plaisir ! Le Chassagne village qui vient de 9 parcelles est un trésor, c’est lui qui m’a fait ressentir le virage stylistique. Moins réduit et coincé en jeunesse que ses aînés, il propose juste ce qu’il faut de gras sec, ses notes de poudre de craie, sa fine patine du bois ! On note aussi la présence d’une toute nouvelle cuvée sur 2023 : « Ma vigne de 1955 », une parcelle de vieilles vignes situées dans le climat « Journoblot » au pied des Criots Bâtard Montrachet. Un village qui a donc un pédigree différent que les autres, un peu comme le sont les enseignères sur Puligny, situé sous les Batard ! Les curieux voudront forcément y goûter ! Dans les Premiers Crus qui ont dépassé la barre des 100€, on a l’embarras du choix... Difficile de dire qui est mieux que l’autre, chacun affiche des arguments différents. Grande finesse tactile dans Vergers, un vin qui se livre en longueur et avec raffinement. Pour certains, il sera plus classe que le Maltroie qui est un peu plus brut de terroir, avec des sensations plus fuselées. Les Chenevottes est un must si vous cherchez le Chassagne parfait. Pas trop léger, pas trop minéral, très long et tendre... C’est le gendre parfait ! On quitte le monde réel en attaquant les Rémilly, cette micro parcelle qui épouse les Chevalier Montrachet et que très peu de domaines proposent. Ici, tout est décuplé, on est plus fin en sensation que sur les crus plus au sud de Chassagne, limite plus « Puligny » dans l’esprit. Sa classe est celle d’un diamant ! Plus intense et affichant un pédigree de terroir excellent, Les Truffières sont au rendez-vous malgré leur rareté. Beaucoup de roche mère ici, une trame de Puligny évidente, et une longueur de dingue.. Le Blanchot est comme chaque année, un Grand Cru déguisé en Premier Cru... C’est normal, il est situé sous le Montrachet, côté sud. Très souvent dans ce vin, on est pas loin d’un Criots (juste en face) avec une grande dimension. On retrouve également le Puligny les Demoiselles, deuxième millésime du domaine du domaine sur ce terroir qui jouxte le Montrachet au nord sur Puligny. Vigne de 4 ans qui entre sur scène dans la gamme et qui scotche tout le monde… On comprend pourquoi quand on passe dans la parcelle et qu’on observe les énormes éclats de craie du Bathonien en surface. C’est haut de gamme, mais niveau Grand Cru, j’ai encore du mal à croire que les vignes soient si jeunes, vu ce qu’il y a dans le verre ! En Grand Cru, les Charlemagne sont forcément grands, ils ne peuvent pas ne pas l’être avec un tel tarif. Poudre de craie dans ce cœur nucléaire de minéralité, avec de l’amande, une trame plus arrondie et douce que sur Chassagne et Puligny. Le Bâtard est un rouleau compresseur, un monstre de puissance à la fois tactile et minéral. Le Chevalier Montrachet se montre plus classe, mais reste indescriptible de présence, de charisme et de longueur… Le tarif affiché décoiffe totalement, mais le vin tout autant. Si vous pouvez vous permettre cette folie, vous ferez partie des rares personnes sur terre à posséder un tel trésor ! Une quille atomique dédiée à un moment de célébration unique !