Barbera d'Alba 2020
Luciano Sandrone

« Deux Barolo de très haut vol... Un pour se régaler, l’autre pour se projeter dans les 15 ans à venir ! » Chers membres, chers Barolo lovers, vous êtes nombreux à suivre depuis des années, notre passion pour les grands vins du Piémont, au sommet desquels trônent les vins du très regretté Luciano Sandrone, cet homme extraordinaire qui nous a quitté en ce début d’année 2023. En parler, c’est faire un bon 20 ans en arrière et repenser à mes premières visites au domaine où je découvrais avec émerveillement les premiers Barolo Cannubis, Le Vigne ou les ensorcelants Valmaggiore. C’est aussi repenser à cette somme de détails qui, très tôt, ont hissé le domaine vers l’excellence : premiers travaux par gravité, élevages en demi-muids de 600 litres, matières peu extraites au beau milieu de l’aire Parker... un profil de vins avant-gardiste ! Derrière son passage se dresse une œuvre exceptionnelle que sa fille Barbara a bien l’intention de perpétrer. La semaine dernière, à Paris, j’ai pu échanger avec Barbara et raviver quelques souvenirs, tout en mettant des mots sur quelques vins qui furent parmi les derniers de Luciano. Je me suis régalé du Barbera 2020, très parfumé et suave qui porte avec panache les instances de cerise burlat et de violette du cépage. Un très léger élevage vient compléter la partition. Perso, j’adore les beaux Barbera car ils offrent le panache aromatique de certaines de nos syrahs mais affichent en même temps un relief salivant plus appuyé. Derrière, nous avons parcouru les Nebbiolo et Barolo, en pointant sur 2019, la grandeur de « Le Vigne », cet assemblage de parcelles qui réunit 5 grandes identités géologiques et les 5 communes célèbres de l’appellation. Portée par ce millésime exquis (aussi grand que les 2016 à mon sens), le vin affiche ces essences de cerise amarena, de pivoine, de roses séchées que complètent quelques écorces d’agrumes. Côté tanins, on sent la magie des grandes années où la force des éléments est enveloppée dans un fruit plein et complet. Une immense quille à attendre 6-7 ans pour un feu d’artifice sensoriel ! Et puisqu’il fut aussi question de se projeter, Barbara avait apporté le sublime « Sibi et Paucis » 2012 de cette cuvée, un genre de « late release » de ces grands Barolo qui ne sortent qu’à 10 ans sur le marché. Là, j’ai pris un shoot de bonheur, tous les tanins sont fondus, on bascule dans l’évolution tout en conservant de manière évanescente, le prisme des 2019... Mais l’harmonie est totale, la bouche est prête, posée, hyper longue... On plane total avec cette bouteille qui permet de remonter le temps et d’illustrer la magie des grands terroirs !

Comment ne pas penser à nouveau, en écrivant ces lignes, au départ de Jacques Puisais, grand professeur qui a passé des années à expliquer le phénomène de la minéralisation des vins dans le temps ! Je garde de cet homme exceptionnel des souvenirs et une richesse d'informations qui m'accompagneront pendant des décennies ! En goûtant à ces Barolo et particulièrement à ces Barolo 2012 à maturité, vous pourrez vous rendre compte de ce qui se passe quand le temps fait son œuvre. Les Nebbiolo, musclés et tanniques en jeunesse, se glissent dans des habits complètement différents quand la barre des 10 ans est atteinte. Leur colonne vertébrale, si elle est née sur un beau spot, demeure et la matière se fond. Côté prix, les grands Barolo sont comme nos grands Bourgogne : haut de gamme mais tellement vibrants... N’hésitez pas à goûter au Barbera aussi, une pure merveille à ce prix !