Champagne Brut Nature Grand Cru Les Saints Rémys 2018
Champagne Marguet

C’est assez lunaire comme visite mais les vins à la fin sont époustouflants ! Voilà un domaine qui, de mes visites en Champagne sur 2020, m'aura marqué au fer rouge, un domaine que je vous invite d'ailleurs à aller voir un jour car l'expérience et la rencontre avec Benoît Marguet sont franchement uniques. Interprète brillant d'Ambonnay (Grand Cru) et vinificateur de quelques chardonnays de la Côte des Blancs, Benoît Marguet fait partie du mouvement biodynamiste "assez fort" de la région, qui pousse ses pratiques à un degré de réflexions qui force le respect, même si certaines d'entre elles ont interpellé les esprits les plus cartésiens lors de notre visite : les couleurs des murs de la cave par exemple, dont les teintes ont été choisies en fonction de la "violence" (je ne fais que citer) du process en cours, puis les choix de la musique en cave... Un peu d’encens par-ci, un énorme Bouddha géant au fond du chais d'élevage... Ajoutez à cela des notions profondes de biodynamie, de cosmos, d'énergie préservée et d'amour et vous vous grattez la tête en vous disant « Suis-je en train de rater un truc ? » Mais quand vient l'heure de la dégustation, là, il faut l'avouer, la visite tourne au grandiose. La série de Blancs de Blancs dessinée par Benoît Marguet s'enchaîne derrière une cuvée de mise en bouche, Shaman, vraiment excellente sur les dernières bases 2019 & 2020, je trouve cette cuvée plus posée et plus complexe que jamais ! Dans le verre, c’est le vin qui rayonne par ses notes de fruits à noyaux, de teintes chaudes de pomme tatin et de céréales. Sa bulle est ouatée, la finale est suave mais pure, avec une salinité qui dynamise sa persistance ! Très très belle entrée en matière qui vous ouvrira l’univers des vins du domaine ! Derrière, il faut se pencher sérieusement sur les parcellaires, toutes issues de micro-vignobles (bio of course) dont les tirages sont super confidentiels. L’Avize Grand cru 2018 est à la hauteur de la réputation du village, avec cette compression de sel au cœur d’un souffle agrumé. Si le millésime fut productif, il fut surtout qualitatif du point de vue sanitaire, ce qui a intensifié la pureté! On guettera la superbe vendange 2019 mais, en attendant, ne ratez pas ce trésor livré en tout petits volumes. Derrière, place à sa majesté « pinot noir » avec une déclinaison de 2 parcelles d’Ambonnay, le Grand Cru de rêve par excellence pour ce cépage, auxquels s’ajoutent les Beurys et Le Parc (assemblage ou pur chardonnay). Ici, difficile de choisir, chacune affiche des arguments singuliers : Ruelles est une vigne de 1967, que j’avais déjà spottée comme une quille essentielle de la cave sur le millésime 2015 ! Joli coffre de pinot pur, sur fond de mirabelle, de pomme rôtie, de raisin macéré avec le prisme salin qui vient trancher vigoureusement ce vin non dosé ! 2018 est beau, mais il faudra un peu de patine en cave, avis à ceux qui ont une cave fraîche ! Derrière, Les Beurys tient son rang, nous avions déjà souligné ce Grand Cru d’Ambonnay sur 2016 où le pinot n’est pas seul (30%), il trouve un peu d’éclat par rapport aux autres par la présence de chardonnay (70%). Il contracte comme dans le dernier tirage la puissance des éléments du Cru, son contraste de vinosité et de fraîcheur saisit toutes les papilles. Là encore, c’est un « zéro dosage », tout est mûr, très mûr même sur 2018 ! Tirage très limité puisque 39 ares de vignes. Les Saint Remys fchaest son grand frère, toujours un parcellaire Grand Cru du même secteur, mais de pur pinot. Là, on ouvre le coffre, la puissance, les chakras... Tout est plus puissant et plus long… J’ai du mal à choisir entre lui et Les Ruelles dans la gamme, sachant que la cuvée ultime du village est « Les Crayeres ». Enfin un petit mot sur une toute nouvelle cuvée qui entre dans notre allocation : Le Parc. Là, c’est la rencontre du jour et de la nuit, puisqu’on parle d’un 100% chardonnay sur Ambonnay. Une vigne de 1982 sur socle sable limoneux qui préserve la finesse du cépage et sa floralité. Derrière, la craie, l’agrume confit (très différent du Grand Cru Avize ) et beaucoup de panache. Un tirage limité à 1600 cols en moyenne pour ce flacon, qui n’est pas produit chaque année ! De quoi piquer la curiosité de celles et ceux qui cherchent des vins assez exclusifs ! En parlant d’exclusif, et de vibrant, vous retrouverez aussi deux tirages de Sapience, cette cuvée qui fait la fierté du domaine car pionnière dans la série à être certifiée en biodynamie. Trépail, Cumière, et Bouzy sont ici le socle de cette cuvée qui passe plus de temps sur lattes que les autres. Le 2014 est superbe, bien posé, on aimerait que les parcellaires atteignent cette plénitude un jour. Goûtez-y si vous voulez une très belle cuvée de gastronomie pour accompagner un dîner en tête à tête ! Le 2010 est un poil plus évolué, mais plein de panache grâce à ce dégorgement tardif !

Bon, c’est un peu la folie en ce moment en Champagne… Le business à l’export explose tous les records, la demande de champagnes d’auteurs est à son firmament… Cela fait grimper les prix sérieusement, malgré la très généreuse et très belle vendange 2022, autour de laquelle, on espérait une petite accalmie. J’invite donc les fondus de Champagne à saisir ce qui est à saisir avant que les prix ne deviennent trop dissuasifs, le domaine pratique le jeu des parcellaires mais ne franchit pas la barre des 100€ pour celles- ci… Dans les cuvées abordables, Shaman boxe dans une super catégorie !