Morgon Javernières 2024
Domaine Louis Claude Desvignes

« Un millésime de fraîcheur qui scintille au domaine, un vrai millésime de latitude nord… Encore une fois, la famille Desvignes signe certains des plus grands vins de la région. Leur constance force le respect et justifie pleinement les 3 étoiles RVF. »

Chers membres passionnés, je vous l’ai souvent écrit, parfois même martelé dans nos J’aime / J’achète les plus enflammés : le domaine Louis-Claude Desvignes est une pierre angulaire des Beaujolais d’émotion. Un domaine que nous vénérons chez Chais d’Œuvre, tant pour la régularité exemplaire des vins que pour la sincérité absolue de leur vision.

À chaque visite, ou chaque dégustation à Paris, vient confirmer ce style que Claude-Emmanuel et Louis-Benoît défendent avec une rare cohérence : des vins juteux, précis, profonds, qui parlent d’abord de terroir. Ici, pas de macération carbonique destinée à lisser les messages, mais une vinification traditionnelle — foulage, macérations longues, fermentations maîtrisées, élevages en foudres — où tout commence dans les vignes. Le gros du travail est fait là, avec une obsession pour la date juste de récolte. Louis-Benoît me le confiait encore lors de sa dernière visite : rechercher « le mi-corps, la tension et le salin ». Tout est dit. Ce sont ces choix-là qui dessinent des bouches salivantes, élégantes, persistantes, jamais démonstratives mais toujours habitées.

Les 2024, comme les 2023, s’inscrivent dans cette lignée lumineuse, avec ce supplément d’énergie et de relief qui rappelle que les surmaturités ne sont pas toujours un atout pour ériger de grands vins de lieu. J’ai beaucoup aimé 2024 pour sa trame saillante et ses tanins doux (un millésime frais extrait moins de tanins). Les maturités sont abouties, le fruit vibrant et salivant, le tout sans creux en milieu de bouche. Le crescendo de la gamme au cœur des parcellaires est fascinant.

Dans le verre, La Voûte Saint-Vincent reste une évidence absolue. Cette cuvée chouchou des membres, issue de plusieurs parcelles autour du village, livre sans retenue un Morgon juteux, sombre et vibrant, où la cerise acidulée, le noyau, les épices fines et une touche de poivre explosent avec un naturel désarmant. Les tanins sont d’une douceur totale sur 2024, tout est posé, fluide, digeste. Un vin qu’on ouvre sans réfléchir… et qu’on finit trop vite.

Javernières, dans ses différentes nuances, impressionne par sa race et son potentiel. Le registre est plus sérieux, plus terrien, avec ce grip minéral qui étire la bouche et promet de magnifiques émotions après quelques années de patience. Pivoine, écorce d’agrume, poivre sauvage, vendange entière parfaitement intégrée : on touche ici à un Morgon de garde, profondément ancré dans son granit.

Château Gaillard a scoré lors de notre dégustation. Ce vin, que nous achetons depuis trois millésimes, est d’une douceur tactile fabuleuse sur 2024, avec un corps plein et un fruit souple. Il plaira à ceux qui aiment les plaisirs immédiats et les vins disciplinés !

Si vous faites partie des esthètes du club, alors penchez-vous sur Pérou Montpelain ou Corcelette, qui déclinent chacun une facette du génie du domaine. Des cuvées qui concentrent parfois de très vieilles vignes, et qui génèrent des vins d’une profondeur aromatique rare dans la région. Nous avons retrouvé une poignée de 2020 et 2018 sur Corcelette qui témoignent de ce potentiel. Les magnums de Montpelain 2022 sont à classer au rayon « bombe à retardement » de votre cave !

Parce qu’au-delà des 3 étoiles RVF et des éloges unanimes de la presse, il y a ici un domaine d’une honnêteté intellectuelle rare, qui ne triche jamais avec son terroir ni avec ses convictions. Les choix qualitatifs sont forts, parfois exigeants, toujours assumés.
Oui, certaines cuvées ont légèrement évolué en prix ces dernières années, et c’est tant mieux ! Tout cela reste d’une cohérence totale au regard du niveau des vins, de leur capacité de garde, et surtout de l’émotion qu’ils procurent. Pour ma part, c’est un rendez-vous annuel immuable de fin d’année : des bouteilles que je mets en cave sans hésiter, et que j’ouvre toujours avec un immense plaisir, sans jamais me demander si « ça valait le coup ».