Quarts de Gastines Anjou 2024
Domaine Pierre Ménard

« Si tu ne connais pas Pierre Ménard en Anjou, c’est que t’es déjà vieux. »
La sentence était tombée comme ça, gentiment assassine, dans la voiture, un matin de printemps. Arthur et Florian avaient ce sourire en coin qui veut dire : on va te montrer un truc… tu n’es pas prêt. Et ils avaient raison ! »
Chers membres passionnés, au bout de 13 ans à visiter plus de 120 domaines par an, à déguster partout, tout le temps, je pensais avoir stabilisé mes repères, mes styles, mes terrains de jeu. Mais voilà, l’arrivée de la nouvelle garde du sourcing chez Chais d’œuvre, composée d’Arthur, Florian, Anna, Paul — a réveillé tout ça. Leur curiosité, leurs discussions parfois passionnées, parfois provocatrices ( #vinnature), leur énergie… C’est ce souffle-là qui m’a conduit en début d’année jusqu’à Bellevigne-en-Layon chez Pierre Ménard, une rencontre qui fut un coup de foudre immédiat.

Vigneron humble, précis, philosophe sans le dire, qui parle de ses sols comme de personnages, m’a vraiment embarqué par sa vision, son discours, mais plus encore, par la vibration que procurent ses vins ! Si j’avoue rester songeur quand on s’aventure dans la frange « nature », de la Loire, là, j’ai vraiment trouvé chaussure à mon pied, et je dois ce coup de cœur à l’équipe !

Pour ceux qui découvrent, Pierre Ménard est un vigneron né globe-trotter : Une expérience dans le Douro (Ramos Pinto), puis à Pauillac (Latour), et enfin chez Tokaj (Disznókő)… Un parcours qui a certainement forgé une partie de sa vision, son exigence, son sens du détail.

Depuis 2013, année où il arrête de livrer à la coopérative pour voler de ses propres ailes, Pierre sculpte patiemment une gamme très homogène, qui conjugue précision et générosité aromatique. Le domaine s’étire sur quatre hectares aujourd’hui, en mosaïque, tous proches de la maison sauf un petit bout du côté de Bonnezeaux. A la vigne, rien de dogmatique, mais une cohérence magnifique pour faire parler les sols : viti bio, tisanes, observation, bon sens paysan, et surtout cette volonté de ne jamais imposer un style sur ses vins. Pierre utilise de tout en cave : foudres, muids, verre, inox, pièces… tout est possible, rien n’est systématique.
Les 2023 furent un coup de cœur, et avec Arthur, on s’était juré d’y retourner pour cerner les 2024, millésime plus tendu, mais tout aussi brillant que son ainé. Comme disait Florian dans la dégustation : « c’est totalement ma cam… » Plongez dans le j’achète pour découvrir leurs nuances.

Bon, avant de plonger dans les détails, on soulignera le fait que 2024, est une année qui ne trahit pas la fraicheur ligérienne. Des ph bas, de belles acidités dans les vins, des structures élancées avec des matières plus sveltes qu’en 2022 ou 2023.

Coté chenin, la Varenne de Chanzé est un coup de cœur du millésime, et un vin de haute précision sensorielle. On est à fond dans les fruits de verger, l’ambiance de fleurs blanches, d’amande, de poire, avec une petite trame fumée en finale… C’est une petite merveille habillée d’une matière tout en dentelle.

Le Clos des Mailles joue une partition aromatique assez proche, mais se montre moins lisible en l’état du point de vue aromatique. C’est en bouche que l’on mesure la différence, avec une matière un peu plus concentrée que Chanzé. Dans 5-6 mois, quand il sera bien en place, il poussera plus loin que Chanzé !

Le Quarts de Noël (cuvée préférée de Flo et Arthur) est une boule de nerf, un vin encore un peu comprimé à ce stade, mais on le sait, il faut 12-15 mois à cette merveille pour s’ouvrir. Misez sur elle si vous collectionnez les vins de ce terroir (qui n’a plus rien à prouver), et laissez les s’élever en cave. Vous ne serez pas déçus à la fin, on parle du cœur battant des schistes de la région !

Quarts des Gatines est arrivé derrière dans la gamme des 2024, avec un visage plus souriant, plus floral aussi. On sent que la complexité est à ce stade, supérieure à Noel. Il a pris la troisième place de nos notes !

Pluton est arrivé 2ᵉ dans les blancs préférés de Florian. Je le rejoins ! Plus baroque, poussé par une puissance plus présente, avec un relief plus épicé. C’est un vin qui impressionne au cœur de la gamme, pour sa trame, son volume !

En rouge, Orion évolue un peu cette année. Une vinification à la Ganevat conseillée par une de ses amis qui a travaillé plusieurs années dans le jura. En gros, on met les raisins en cuve, on ferme la cuve pour faire une forme de vinification carbonique. Le résultat est très joli, l’ensemble est parfumé, infusé et floral.

Clou du spectacle, et vin totalement transperçant : Cosmos 2023! L’immense moelleux du domaine, que Pierre nous avait déjà servi en fin de dégustation au printemps ! Là, franchement, on a encore plané ! J’y ai retrouvé la liqueur divine de certains moelleux d’Emmanuel Ogereau, mais avec un contraste acidulé de folie, qui tranche le cœur de bouche à toute vitesse ! Le coing, le miel, les agrumes confits, les raisins secs, les fruits exotiques, avec l’ananas rôti… Sa finale est insolente de sapidité, les sucres deviennent au final, un détail ! Goutez y absolument, on ne croise pas souvent de telles merveilles en Anjou, à ce prix !