Vin de France La Levée 2023
Domaine Alexandre Bain

« Avec cette série de cuvées, j’ai franchi une nouvelle ligne, et découvert un autre visage du Sauvignon ! Mention spéciale pour Pierre Précieuse, d’un relief et d’une persistance qui embarquent… même quand on pense ne pas aimer les styles “nature” »

Chers membres passionnés,

En ce début de semaine, c’est en marchant sur des œufs que j’écris ces quelques lignes, car en 14 ans de Chais d’œuvre, c’est vrai, on a rarement pénétré cet univers….
C’est une porte que j’ai longtemps laissée fermée, par prudence sans doute, mais aussi par manque d’émotion. Oui, les vins “natures” m’ont souvent dérouté : cette odeur de pomme blette, ces esters brouillons, un peu de volatile parfois qui déborde, cette impression que tout se ressemble, quel que soit le terroir ou la main du vigneron. J’y voyais plus souvent de la posture que de la précision.

Et puis, il y a quelques jours, après une discussion avec Alexandre Jean, ancien sommelier de l’Astrance à Paris, et aujourd’hui ambassadeur passionné du domaine Alexandre Bain, j’ai ouvert les yeux. Sa phrase m’a percuté :
“N’y a-t-il pas d’autres portes et sensations que celles que tu connais par cœur dans l’appellation ? Ne déguste-t-on pas trop, avec un seul œil ? ”
Alors, j’ai accepté l’invitation à re-déguster toute la gamme du domaine, et avec Paul, Arthur, Oscar et Anna, on a fini par comprendre !

Ici, à Tracy-sur-Loire, tout près de Pouilly-Fumé, le sauvignon au domaine prend un accent différent — plus libre, plus tactile, plus solaire aussi.
Les élevages longs (souvent plus de deux ans, allant parfois jusqu’à 36 mois) stabilisent la matière, apaisent la fougue, et livrent des vins d’une intensité singulière, tout comme l’est aussi leur relief aromatique. À l’aveugle, impossible de deviner le sauvignon : pas d’herbes fraîches, de pamplemousse, de pierre à fusil, mais des vins qui portent dans une autre dimension sensorielle.

Pour la première fois, je n’ai pas eu le sentiment de passer à côté, mais de découvrir une nouvelle porte ! Plongez dans le j’achète, pour découvrir quelques cuvées !

Bon, je préfère borner ce j’achète, car vous ne retrouverez dans cette sélection, aucun des repères parmi les vins que nous vous avons fait déguster jusqu’alors… Mais c’est bien connu dans un parcours hédoniste autour du vin, il faut savoir s’ouvrir à d’autres vérités !
Commençons par la Levée 2023 : un vin de fruit et de mouvement, tout en pulpe et en fruit. Sa robe n’est pas totalement cristalline, donc au premier regard, j’étais méfiant. Mais au nez, tout était bien posé, avec des nuances assez précises de poire, de genêt, de pomme et de raisin.

Son aîné sur 2020 affiche un autre visage, patiné par le temps, où la maturité du fruit et le gras de l’élevage forment un vin ample, apaisé, presque bourguignon dans son toucher.

Champs Couturier 2023 ne s’adresse pas à tout le monde… Un nez qui évoque des reliefs plus Jurassien, avec un couvert de fruits secs, un corps protéiné, et une allonge qui rappelle certains vins de Ganevat ! Ne la servez pas à n’importe quel invité à la maison, il faut une certaine culture pour aborder ce type de sensations, mais perso, j’ai adoré !

Pierre Précieuse 2022 est mon plus gros coup de cœur. Des raisins très mûrs, un relief d’abricot, de coing, de nèfle, qui rappellent des chenins de Savennières. On sent la noblesse du cru, avec un contraste de matière solaire et d’énergie minérale. Sa texture soyeuse et sa finale saline m’ont laissé un souvenir durable — celui d’un sauvignon hors catégorie.

Bref, Alexandre Bain ne fait les choses comme les autres, mais ce qui est proposé dans le verre mérite un coup de projecteur. Faites vous une idée, les vins restent abordables !