« Un Bordeaux à contre-courant doué d’une empreinte aussi svelte que savoureuse... Un Bordeaux qui parle au Burgundy lovers ! » Cher membre, comment débuter ces quelques lignes sans repenser à ce déjeuner organisé par la famille Amoreau en fin d’année 2022 au Peninsula et à ce discours de Jean-Pierre Amoreau, l’homme qui a porté à bout de bras cette admirable propriété qu’est le Puy dans les Côtes de Francs. En l’écoutant manier le verbe avec sensibilité et poésie, je me disais : « un homme aussi sensible et raffiné ne pouvait faire que des vins à son image, des vins évanescents, délicats et longs... » À ce déjeuner qui réunissait les clients, la presse, mais aussi des chefs stars comme Philippe Etchebest ou Yves Camdeborde (qui ont été ses premiers clients), nous avons parcouru l’histoire de cette propriété, révélée au grand public grâce aux mangas « Les Gouttes de Dieu ». Visionnaire autour de choix avant-gardistes en biodynamie, Jean-Pierre Amoreau a conservé le style maison en échappant aux modes. Chez Chais d’œuvre, nous suivons les millésimes depuis 2015 (un carton à l’époque) et nous nous régalons de ce profil « à part » mais assumé du domaine. En général, quand on aime, on adore, surtout quand on aime les grands rouges de Loire ou les pinots vendangés sur le fil de la fraîcheur. Après les très beaux 2019, plein de floralité présentés l’an dernier, voici les 2020 en version « Emilien et Barthélemy ». Une année précoce, chaude mais pas trop solaire, qui a étoffé le fruit d’Emilien. On retrouve ce profil élancé, salivant, finement mentholé dont les notes de gelée de cassis, de pivoine et de fraise écrasée irradient dans le verre. C’est sans chaleur ni notes compotées que son spectre se livre, avec une longueur déjà fabuleuse. D’ailleurs, j’insiste à nouveau sur ce point : Le Puy ne fait pas des vins larges mais des vins longs. Si je me permets la comparaison, c’est comme Jean-Louis Trapet à Gevrey qui ne cherche pas d’épaisseur dans ses vins mais de la longueur. Pour Barthélemy, comme toujours, c’est une grande bouteille, plus complexe, plus riche en saveurs, un véritable millefeuille de fragrances qui, sur 2020, mérite quelques années de patience pour révéler son potentiel. Sa trame est séveuse, les messages longs, avec ce côté « pot-pourri rose ancienne » qui anime le bouquet. Attendue 10 ans, c’est une bouteille qui touchera !
Vins de mode où véritable kiff sensoriel ? Chacun ira de son commentaire, mais quand on voit la côte et les prix des vieux millésimes du domaine, et particulièrement celle de Barthélemy, on se gratte un peu la tête... Est-ce là le résultat de toute cette émulsion autour des Gouttes de Dieu ? Une mode ? Si c’est le cas, ça commence à faire un bout de temps qu’elle dure, et le soufflé met du temps à redescendre... Ou est-ce que les vins sont vraiment intéressants quand ils arrivent à maturité ? La réponse, vous la trouverez dans le verre. Certains d’ailleurs parmi vous, ont pu déguster de vieux millésimes à Vinapogée, un salon dédié aux vieux millésimes. Côté prix, c’est bien cette spéculation autour de vieux millésimes qui permet au domaine de valoriser comme certains Grands Crus sa grande cuvée. Vau- elle le coup ? Franchement oui, mais à condition de la boire à son apogée, autour de 10-12 ans... C’est là que la chanson commence vraiment ! Concernant Emilien, buvez un 2015 aujourd’hui et vous verrez de quoi on parle !